@. Ampère et l'histoire de l'électricité 

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Laboratoire historique

Ampère a-t-il "manqué" la découverte de l'induction en 1822 ?

Par Christine Blondel

En 1831, Michael Faraday parvient à "créer de l'électricité avec du magnétisme" : un aimant en mouvement crée un courant électrique dans tout circuit voisin. Un courant électrique d'intensité variable produit le même effet, par l'intermédiaire du champ magnétique variable qu'il engendre autour de lui. Ce phénomène radicalement nouveau, l'induction électromagnétique, constitue le principe physique à l'origine des dynamos et des alternateurs.

Cette création d'un courant par un autre courant, à distance du premier, avait été entrevue par Ampère en 1822, donc une dizaine d'années auparavant. Dans l'expérience d'Ampère, un léger anneau de cuivre est suspendu par un fil de soie à l'intérieur d'une bobine circulaire fixe. L'anneau peut tourner autour du fil. Si un courant est créé "par influence" dans l'anneau lorsqu'un courant parcourt la bobine, alors l'anneau pourra être mis en mouvement par un aimant.

Lors des premières expériences en 1821, l'anneau reste immobile et aucun courant "par influence" n'est donc détecté. Mais à Genève, avec un aimant plus puissant, Ampère observe un mouvement de l'anneau en présence de cet aimant particulièrement puissant. Il en conclut que l'anneau a été parcouru par un courant créé sous l' "influence" de la bobine.

Mais cette expérience était destinée à préciser sa théorie du magnétisme et non à la recherche de courants induits. Avec son résultat positif, cette expérience ne soutient plus sa théorie du magnétisme et Ampère la laisse de côté. Pour en savoir plus sur l'expérience d'Ampère voir la page Créer de l'électricité avec le magnétisme ? dans le Parcours pédagogique du site.

Il ne suffit pas d'observer un phénomène pour en être "l'inventeur", encore faut-il l'étudier suffisamment pour en donner les règles, si ce n'est une interprétation. Lorsqu'il apprend la découverte de l'induction par Faraday, Ampère écrit à son ami Auguste de La Rive, avec qui il avait réalisé son expérience à Genève : "Il est de fait que nous avons obtenu les premiers, en 1822, le courant électrique par influence ou induction, comme dit M. Faraday". Mais un peu plus loin il reconnaît : "C'est à M. Faraday qu'appartient la découverte de toutes les lois des courants produits par influence".

Il ne s'agit donc pas de poser une question de priorité. En revanche l'expérience d'Ampère de 1822 soulève de nombreuses questions fort intéressantes. Pourquoi une expérience est-elle abandonnée ? Comment peut-elle soutenir des théories différentes ? Pourquoi est-elle mal comprise par les autres savants ?

En outre les quelques reproductions de cette expérience "abandonnée" par Ampère ont produit des résultats divergents. En 1895, à Londres, Silvanus P. Thomson n'observe pas de déviation de l'anneau. Dans les années 1970, à New York, Samuel Devons obtient "un effet spectaculaire" avec une déviation temporaire de l'anneau. En 1985, à Jérusalem, Eric Mendoza obtient une déviation faible mais permanente de l'anneau. Comment comprendre aujourd'hui ces résultats divergents ?

Réplication et simulation de l'expérience d'Ampère par des élèves-ingénieurs de l'Ecole Centrale Lyon

En 2005 un groupe de cinq élèves-ingénieurs en 1ère année à l'Ecole Centrale Lyon a reproduit, "répliqué", l'expérience d'Ampère de 1822 sur les courants par influence. Les étudiants ont également calculé une simulation de l'expérience sur ordinateur.

Leur travail montre que le résultat de cette expérience, apparemment simple, est très sensible aux paramètres mécaniques du dispositif : moment de torsion du fil de suspension, moment d'inertie de l'anneau, etc. Suivant les valeurs de ces paramètres, qui ne peuvent être définis à partir du mémoire d'Ampère, et suivant la durée d'observation du phénomène, le mouvement de l'anneau peut être très faible (ce qu'a observé Thomson), transitoire (comme le prévoit la théorie et comme l'a observé Devons) ou sembler permanent (ce qu'ont observé Ampère et Mendoza).

Les conclusions de la réplication et de la simulation sont précisées dans le rapport d'étude :

Jérémy Auer, Eric Baudon, Isabelle Gile, Barbara Peel, Valérie Seguin, Projet Ampère (Projet d'étude promotion ECL 2007, nº66), 2005.
Tuteurs : Sarah Carvallo (ECL), Philippe Auriol (ECL), Laurent Krahenbühl (CNRS).
Conseil historique : Christine Blondel (CNRS), Paolo Brenni (CNR, Florence).



Mise en ligne : 2006 (mise à jour : août 2010)

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