[dans la même chemise, une variante de ce poème, intitulée "L'absence", avec de très légères variations dans le texte]
Plainte à l’amour
C’est en vain que la Nature
M’offre ici tous ses trésors,
Que de fleurs et de verdure
Elle couronne ces bords.
Loin de la beauté que j’aime,
Rien ne peut plaire à mon coeur;
Le retour du printemps même
Aigrit encore ma douleur.
Je ne vois qu’avec envie
Ces bois, ces prés, ces coteaux,
Cette campagne fleurie,
Ces vallons et ces berceaux.
Ils sont pleins d’êtres sensibles,
Dévorés des mêmes feux,
Mais sous ces ombres paisibles,
Que leurs jours sont plus heureux !
De l’amour qui me déchire,
Ils ignorent les rigueurs ;
Je gémis sous son empire,
Ils bénissent ses faveurs,
Cesse, heureuse Philomèle
De former des sons si doux
Ta destinée est trop belle
Pour n’en être pas jaloux.
Cruel auteur de mes peines,
Dieu des ris et des plaisirs,
Je n’ai trouvé dans tes chaînes
Que des pleurs et des soupirs ;
De ma douce indifférence,
N’as-tu troublé le repos
Que pour lasser ma constance
Sous le poids de tant de maux ?