FEU ELECTRIQUE, phénomène de l'électricité. Nous apercevons le feu électrique lorsque la
matière de l'électricité étant suffisamment rassemblée & dirigée d'une manière convenable,
éclate & brille à nos yeux, s'élance comme un éclair, embrase, fond, & consume les corps
capables d'être consumés, & produit dans ces corps plusieurs effets du feu ordinaire.
On entend aussi par le feu électrique ce fluide très délié & très actif, qui est répandu dans
tous les corps, qui les pénètre, & les fait mouvoir suivant certaines lois d'attraction & de
répulsion, & qui opère en un mot tous les phénomènes de l'électricité. On a donné à ce
fluide le nom de feu, à cause des propriétés qui lui sont communes avec le feu élémentaire,
entr'autres celle de luire à nos yeux au moment qu'il s'élance avec impétuosité pour entrer ou
sortir des différents corps, d'allumer les matières inflammables, &c. Voyez FEU.
Nous devons donc considérer le feu électrique sous deux points de vue différents : premièrement
comme phénomène de l'électricité ; nous examinerons sa production, sa force, sa propagation, &c.
Ensuite nous les considérerons comme cause des effets de l'électricité, & nous rapporterons les
sentiments des principaux physiciens, sur sa nature & sur la manière dont il produit les
phénomènes électriques.
Otto Guericke & Boyle ont remarqué qu'en frottant vivement certains corps électriques, ils
répandaient une lumière plus ou moins vive dans l'obscurité, que quelques-uns, comme les
diamants, conservaient pendant un temps assez considérable. On trouve dans le recueil des
expériences d'Hauksbee une suite d'observations très curieuses sur la lumière que répandent
plusieurs corps frottés contre différentes matières, tant en plein air que dans le vide de la
machine pneumatique. Mais alors les Physiciens regardaient cette lumière plutôt comme un phosphore
que comme le fluide électrique rendu sensible à nos yeux par l'effet du frottement.
Ce fut à l'occasion de la douleur que ressentit M. Dufay, en tirant par hasard une étincelle de
la jambe d'une personne suspendue sur des cordons de soie, qu'il pensa que la matière électrique
était un véritable feu, capable de brûler aussi bien que le feu ordinaire ; & que la piqûre
douloureuse qu'il avait ressentie, était une vraie brûlure. Enfin plusieurs savants d'Allemagne
ayant répété les expériences de M. Dufay, & poursuivi ses recherches, M. Ludolf vint à bout
d'enflammer l'esprit-de-vin par une étincelle électrique qu'il tira du pommeau d'une épée, &
confirma par cette belle expérience, la vérité de ce qu'avait avancé M. Dufay, sur la
ressemblance du feu & de la matière électrique.
On sait aujourd'hui que tous les corps susceptibles d'électricité, c'est-à-dire presque tous les
corps de la nature, font apercevoir le feu électrique d'une manière plus ou moins sensible, dès
qu'on les électrise à un certain degré. Dans les corps naturellement électriques, on ne manque
guère de produire ce feu en les frottant un peu vivement, après les avoir bien dépouillés de
toute leur humidité : la lumière qu'ils répandent est plus ou moins vive, suivant la nature de
ces corps ; celle du diamant, des pierres précieuses, du verre, &c. est plus blanche, plus vive, &
a bien plus d'éclat que celle qui sort de l'ambre, du soufre, de la cire d'Espagne, des matières
résineuses, ou de la soie. Les uns & les autres brillent encore davantage, lorsqu'ils sont frottés
avec des substances peu électriques, comme du papier doré, la main, un morceau d'étoffe de laine,
que lorsqu'on emploie une étoffe de soie, la peau d'un animal garnie de poil, ou même du cuir :
mais quelles que soient les matières que l'on emploie pour frotter les corps électriques, ils ne
rendent presque point de lumière si les corps avec lesquels on les frotte n'ont quelque
communication avec la terre, soit immédiatement, soit par une suite de corps non électriques. Par
exemple, si une personne étant sur le plancher frotte vivement un tube de verre, elle en verra
bientôt sortir des éclats de lumière : mais si cette personne fait la même opération étant
montée sur un pain de résine, avec quelque vivacité qu'elle frotte le tube, la lumière
s'affaiblit, s'éteint, & ne reparaît que lorsque la personne se remet sur le plancher, ou
lorsqu'on approche d'elle quelque corps non électrique qui communique avec la terre.
Cette lumière est plus abondante & a encore plus d'éclat, lorsque les frottements se font dans le
vide, ou sur quelque vaisseau dont on a épuisé l'air intérieur par la machine pneumatique ; on
peut dire en général que le feu électrique se manifeste bien plus aisément dans un espace vide,
ou presque vide, que dans celui qui est rempli d'air : en voici les preuves.
Lorsqu'on frotte contre un coussin un globe plein d'air, l'un & l'autre renfermés sous le
récipient de la machine pneumatique, ce globe, après qu'on a épuisé l'air intermédiaire,
répand continuellement & tant que dure le frottement, une lumière très vive & très abondante :
cette lumière s'affaiblit à mesure qu'on laisse rentrer l'air, quoique l'on continue de frotter le
globe avec la même force. Il en est de même d'un globe vide d'air que l'on frotte dans l'air libre
; le plus léger frottement excite dans son intérieur beaucoup de lumière, dont l'éclat diminue
graduellement à mesure que l'on introduit de l'air dans le globe. C'est une observation assez
générale que la lumière que l'on excite dans un vaisseau épuisé d'air paraît toujours plus
dans son intérieur, & y prend sa direction de tous les points de la surface : elle ne s'attache pas
aux doigts, lorsqu'on les approche à une petite distance, comme dans le cas ordinaire ; elle
s'anime seulement & devient plus vive à l'approche du doigt, même quelque temps après qu'on a
cessé de frotter. Cependant tous les traits de lumière tendent toujours vers l'intérieur du
globe.
Le feu électrique se répand avec tant de facilité au travers d'un espace vide d'air, qu'on
l'excite sur le champ dans un récipient, ou dans tout autre vaisseau bien vidé, par la simple
approche du tube ou de tout autre corps électrisé ; & on a observé que cette lumière était
encore plus vive lorsque les vaisseaux vides d'air tournaient sur leur axe, ou
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