Sources primaires > LE MONNIER, Aimant, [juin] 1751.
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magnétique ; mais parce que la matière magnétique se distribue dans le fer suivant une seule & 
même direction. Voici une expérience qui prouve la nécessité du contact du fer & de l'armure de 
l'aimant, pour que la communication soit parfaite : si on passe une aiguille de boussole d'un pôle 
à l'autre de l'aimant, en lui faisant toucher successivement les deux boutons de l'armure, elle 
acquerra la vertu magnétique, & se dirigera nord & sud, comme l'on sait. Mais si après avoir 
examiné sa direction, on la repasse une seconde fois sur l'aimant dans le même sens qu'on l'avait 
fait d'abord, avec cette seule différence, qu'au lieu de toucher les boutons de l'armure, on ne 
fasse que l'en approcher, même le plus près qu'il est possible ; sa vertu magnétique s'affaiblira 
d'abord, & elle en acquerra une autre, mais avec une vertu directive précisément contraire à la 
première. Et si on continue à l'aimanter dans le même sens, en recommençant à toucher les 
boutons de l'armure, cette seconde vertu magnétique se détruira, & elle en reprendra une autre 
avec sa première direction ; & on détruira de cette manière son magnétisme & sa direction autant 
de fois que l'on voudra. 
4°. Pour bien conserver la vertu magnétique que l'on a communiquée à un morceau de fer, il faut 
le garantir de toute percussion violente ; car toute percussion vive & irrégulière détruit le 
magnétisme : on a aimanté une lame d'acier sur un excellent aimant, & après avoir reconnu sa 
vertu attractive, qui était très forte, on l'a battue pendant quelque temps sur une enclume ; elle 
a bientôt perdu toute sa vertu, à cela près, qu'elle pouvait bien lever quelques parcelles de 
limaille, comme fait tout le fer battu, mais elle n'a jamais pu enlever la plus petite aiguille : la 
même chose serait arrivée en la jetant plusieurs fois sur un carreau de marbre. 
5°. L'action du feu détruit aussi en grande partie la vertu magnétique que l'on a communiquée : 
après avoir bien aimanté une lame de fer, on la fait rougir dans le feu de forge jusqu'au blanc ; 
lorsqu'on l'a présentée toute chaude à de la limaille de fer, elle n'en a point attiré : mais 
elle a repris le magnétisme en se refroidissant. Cependant lorsqu'on a aimanté une lame de fer 
actuellement rouge, elle a attiré de la limaille de fer, & cette attraction a été plus vive 
après que la lame a été refroidie. 
6°. L'action de plier ou de tordre un morceau de fer aimanté lui fait aussi perdre sa vertu 
magnétique : on a aimanté un morceau de fil de fer de manière qu'il se dirigeait avec vivacité, 
suivant le méridien magnétique ; ensuite on l'a courbé pour en former un anneau, & on a trouvé 
qu'il n'avait plus de direction sous cette forme : on l'a redressé dans son premier état : mais 
toutes ces violences lui avaient enlevé la vertu magnétique, en sorte qu'il ne se dirigeait plus. 
On a conjecturé que les deux pôles avaient agi l'un sur l'autre dans le point de contact, & 
s'étaient détruits mutuellement ; on a donc aimanté de nouveau le même fil de fer & plusieurs 
autres semblables, & on en a fait des anneaux imparfaits. On a remarqué qu'ils avaient aussi perdu 
leur vertu magnétique sous cette nouvelle forme, & qu'ils ne la recouvraient que quand on les avait 
redressés. Cette expérience réussit toujours quand le fil de fer est bien & dûment courbé, & 
surtout si on lui fait faire plusieurs tours en spirale sur un cylindre ; car si la moindre de ses 
parties n'est pas courbée avec violence, elle conservera son magnétisme : la même chose arrivera 
à un fil de fer aimanté qu'on plie d'abord en deux, & dont on tortille les deux moitiés l'une sur 
l'autre ; en sorte qu'il paraît que le magnétisme est détruit par la violence qu'on fait souffrir 
au fer dans tous ces cas, & par le dérangement qu'on cause dans ses parties, comme il est facile de 
s'en convaincre par le moyen du microscope. 
Voici une expérience qui confirme cette vérité, & qui fait voir que le dérangement causé dans 
les parties du fer détruit le magnétisme. On a mis de la limaille de fer dans un tuyau de verre 
bien sec, & on l'a pressée avec soin ; on l'a aimantée doucement avec une bonne pierre armée, & 
le tube a attiré des parcelles de limaille répandues sur une table : mais sitôt qu'on a eu 
secoué le tube, & changé la situation respective des particules de limaille, la vertu magnétique 
s'est évanouie. 

Du fer aimanté sans avoir jamais touché à l'aimant. 
Il n'est pas toujours besoin d'une pierre d'aimant, ou d'un aimant artificiel, pour communiquer la 
vertu magnétique au fer & à l'acier : ces corps s'aimantent quelquefois naturellement ; on les 
aimante quelquefois par différents moyens, sans qu'il soit nécessaire d'emprunter le secours 
d'aucun aimant.  
Premièrement, un morceau de fer quelconque de figure oblongue, qui demeure pendant quelque temps 
dans une position verticale, devient un aimant d'autant plus parfait, qu'il a resté plus longtemps 
dans cette position : c'est ainsi que les croix des clochers de Chartres, de Delft, de 
Marseille, &c. sont devenues des aimants si parfaits, qu'elles ont presque perdu leur 
qualité métallique, & qu'elles attirent & exercent tous les effets des meilleurs aimants : 
d'ailleurs la vertu magnétique qu'elles ont ainsi contractée à la longue, est demeurée fixe & 
constante, & se manifeste dans toute sorte de situation. Pour s'en convaincre, il n'y a qu'à fixer 
verticalement sur un liège C un morceau de fer a b (figure 54.) [voir fac-similé] qui ait [sic] resté longtemps 
dans la position verticale, & faire nager le tout sur l'eau ; si on approche de l'extrémité 
supérieure a de ce morceau de fer, le pôle boréal B d'une pierre d'aimant, le fer sera attiré, 
mais il sera repoussé si on lui présente l'autre pôle A de la pierre : de même si on approche le 
pôle A de l'extrémité inférieure b du fer, celui-ci sera attiré, & repoussé si on en approche 
le pôle B de l'aimant.  
En second lieu, les pelles & les pincettes, les barres de fer des fenêtres, & généralement 
toutes les pièces de fer qui restent longtemps dans une situation perpendiculaire à l'horizon, 
acquièrent une vertu magnétique plus ou moins permanente, suivant le temps qu'elles ont demeuré 
en cet état ; & la partie supérieure de ces barres devient toujours un pôle austral, tandis que 
le bas est un pôle boréal. 
3°. Il y a certaines circonstances dans lesquelles le tonnerre communique au fer une grande vertu 
magnétique : il tomba un jour dans une chambre dans laquelle il y avait une caisse remplie de 
couteaux & de fourchettes d'acier destinés à aller sur mer ; le tonnerre entra par l'angle 
méridional de la chambre justement où était la caisse ; plusieurs couteaux & fourchettes furent 
fondus & brisés ; d'autres qui demeurèrent entiers, furent très vigoureusement aimantés, & 
devinrent capables de lever de gros clous & des anneaux de fer ; & cette vertu magnétique leur fut 
si fortement imprimée, qu'elle ne se dissipa pas en les faisant rougir. 
4°. La même barre de fer peut acquérir sans toucher à l'aimant des pôles magnétiques, fixes 
ou variables, qu'on découvrira facilement par le moyen d'une aiguille aimantée en cette sorte. On 
approche d'une aiguille aimantée, bien mobile sur son pivot, une barre de fer qui n'ait jamais 
touché à l'aimant, ni resté longtemps dans une position verticale ; on soutient cette barre de 
fer bien horizontalement, & l'aiguille reste immobile quelle que soit l'extrémité de la barre 
qu'on lui présente ; sitôt qu'on présente la barre dans une situation verticale, aussitôt son 
extrémité supérieure attire vivement (dans cet hémisphère 
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