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> CARRON, Lettres d’Elise, .
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Élise Carron à sa soeur Julie (1) (a)
Ce jeudi soir [8 décembre 1796]

... Ce pauvre Ampère est sûrement gelé en quelque coin, ou il se dégèle près de toi, car je 
ne l'ai vu ni par trou ni par fenêtre. Je tremble qu'il ne t'ait aperçue là-bas et qu'il ne soit 
pas revenu à Poleymieux ; c'est moi qui serais cause de ça. Je me dis pourtant qu'il a trop de 
délicatesse pour ne pas sentir qu'il n'y en aurait point à aller te rendre ses visites à Lyon, 
maman n'étant pas près de toi. D'un autre côté, s'il pense que nous sommes seules à 
Saint-Germain, c'est une raison pour l'empêcher d'y mettre le pied. Je voudrais pourtant qu'il y 
vint, car ils vont tous croire ce qui est, ne doutant plus que les livres ne servent de prétexte et 
qu'en ton absence il n'ait plus d'empressement à les apporter... La neige ne fond point... et Mme 
Ampère l'empêche peut-être de se mettre en route. Enfin je m'y perds... Les peigneurs de chanvre 
ont dit à Claudine que c'était la maison du Bon Dieu, que la maman et le fils étaient si bons, si 
bons, que c'était plaisir chez eux ! Viendra-t-il demain ? Je regarde toujours de ma place et ne 
vois rien. S'il arrive et que maman sorte de la salle, il me va prendre à partie ; j'ai déjà 
préparé mille petites réponses qui sont toujours les mêmes. J'en voudrais savoir qui pussent le 
rendre heureux sans trop avancer les choses ; car il m'intéresse par sa franchise, sa douceur, et 
surtout par ses larmes, qui sortent sans qu'il le veuille. Pas la moindre affectation, point de ces 
phrases de roman qui sont le langage de tant d'autres. Arrange-toi comme tu voudras, mais laisse-moi 
l'aimer un peu avant que tu l'aimes ; il est si bon ! Je viens d'avoir avec maman une longue 
conversation sur vous deux. Maman assure que la Providence mènera tout ; moi je dis qu'il faut 
aider la Providence. Elle prétend qu'il est bien jeune, je réponds qu'il est bien raisonnable, 
plus qu'on ne l'est à son âge... 

(1) Il résulte du journal que Julie est restée à Lyon du 7 décembre 1796 au 27 janvier 1797, du 
14 février au 3 mars et du 9 décembre 1797 au 1er février 1798. Pendant la première absence, les 
lettres très spirituelles d'Élise Carron à sa sœur, publiées par Mme Cheuvreux d'après des 
autographes dont nous n'avons pas eu connaissance, complètent si bien le journal d'Ampère que nous 
avons cru devoir en reproduire des extraits importants. Il faut seulement en rectifier les dates, 
souvent arbitrairement imaginées dans la publication et se rappeler qu'en 1796, Élise avait 29 ans 
quand Julie en avait 23 (au lieu d'être la cadette comme le croyait Mme Cheuvreux), Ampère en 
ayant 21 : ce qui explique le ton. 

(a) Correspondance du Grand Ampère, t. I, p. 27
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