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Sources primaires > HALLER (von), Fluide nerveux, 1776.
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facilité. Il est d'une molesse presque égale à celle de la moelle allongée, mais il est plus 
rouge. Il en est à peu près de même de tous les autres nerfs. 
Ils sont bien éloignés d'être tendus : ils sont collés aux artères, aux tissus cellulaires les 
plus voisins, arrêtés dans toute leur longueur par une infinité de filets absolument incapables 
d'aucun balancement, & très souvent d'une molesse, très remarquable dans les nerfs, qui partent du 
tronc sympathique. S'il y en a de durs, ce sont les nerfs des extrêmités, qu'un tissu cellulaire 
serré enveloppe, en liant ensemble les faisceaux dont le nerf est composé. L'extrêmité des nerfs 
est très souvent d'une molesse égale à celle du cerveau, ils le sont généralement dans les 
organes de la vue, de l'ouïe & de l'odorat ; c'est dans ces organes cependant, & surtout dans ceux 
de l'ouïe, qu'on les supposerait le plus capables d'oscillation. 
Qu'on découvre un nerf quelconque, qu'on le divise, il ne se retire pas, sa section n'accroît 
point ; c'est bien le contraire, les deux extrêmités du nerf divisé s'allongent & deviennent 
assez longues pour être placées à côté l'une de l'autre. 
Les nerfs ne sont point irritables. On a placé des nerfs sur les divisions d'un instrument de 
mathématique ; ces divisions étaient assez fines pour rendre le plus petit déplacement sensible. 
On a irrité le nerf, le muscle, qui en reçoit les branches, s'est contracté. Le nerf lui-même 
n'a changé de place en aucune manière, & le microscope n'y a point apperçu de mouvement. Il est 
étonnant que la prévention ait pu s'élever contre une expérience aussi simple. 
Si le nerf est incapable d'osciller, s'il est trop mou pour être élastique, si toute dureté est 
accidentelle chez lui, s'il est immobile dans cette partie même, ce ne peuvent plus être des 
temblements qui portent l'impression des objets extérieurs jusqu'au siège de l'âme : il faudra 
revenir à une liqueur pour expliquer ce transport. 
C'est cette liqueur qu'on appelle fluide nerveux, & qui a porté le nom d'esprit 
animal, ou vital. Cette liqueur, dont nous tâchons de fixer la nature, sera 
ébranlée par le choc imprimé à l'organe : son mouvement sera continué au cerveau, elle 
ébranlera à son tour le siège corporel de l'âme. 
On a fait une objection qui n'est pas sans ressemblance. L'objet extérieur frappe le nerf, dit-on 
; on comprend assez si le nerf agit par sa partie solide, que ce solide ébranlé cause une 
sensation : on ne comprend pas de même, comment l'âme peut s'apercevoir d'une impression faite sur 
un fluide, toujours mobile, & qui cède au choc. 
On n'a pas pris garde que l'âme ne sent pas dans l'organe, & qu'elle ne sent que dans le cerveau. 
Dans l'amaurose l'oeil peut être parfaitement bien constitué ; le pinceau optique se dessinera sur 
la rétine, mais l'âme ne le voit pas. C'est qu'une tumeur placée entre l'oeil & son origine aura 
comprimé le nerf ; si donc l'impression du pinceau optique ne peut être représentée à l'âme 
que dans le cerveau, il est certainement bien plus probable que ce soit par un liquide mis en 
mouvement dans l'oeil, & qui vient frapper une fibre médullaire, vrai organe de l'âme. Le choc de 
la moelle solide du nerf optique pourrait bien plus difficilement se continuer à une grande 
distance, du doigt, par exemple, jusqu'au cerveau, vu l'inertie, la molesse & l'incapacité pour les 
oscillations, propriétés évidentes de la moelle nerveuse. 
Ce liquide invisible & impalpable doit avoir des attributs, sans lesquels il ne saurait s'acquitter 
de sa fonction. 
Il doit être extrêmement subtil, puisqu'il a des canaux de la plus grande finesse à parcourir : 
extrêmement mobile, puisqu'il va dans le moment même animer un muscle éloigné, & puisque de 
certains animaux parcourent très certainement un pied dans moins d'une seconde, & que dans chacun 
de ces élancements une infinité de muscles sont contractés & relâchés. 
Le fluide nerveux doit avoir une force suffisante pour servir d'un puissant stimulus à la 
fibre musculaire, dont la contraction suit sans intervalle l'affluence de ce fluide. 
Malgré sa mobilité & sa vitesse, il doit être attaché aux nerfs & ne pas les abandonner, ni se 
répandre dans la cellulosité qui enveloppe le nerf. S'il pouvait s'y répandre, on ne concevrait 
plus comment le fluide accéléré par la volonté, pourrait animer à une grande distance 
des muscles avec tant de force. Enfin ce fluide doit être d'une nature assez exempte 
d'âcreté, pour ne pas être sensible au nerf qu'il parcourt. 
Il ne paraît pas que de l'eau un peu visqueuse & d'une nature approchante du blanc d'oeuf, puisse 
se mouvoir avec une célérité suffisante, ni servir d'aiguillon à la fibre musculaire, dont elle 
appaiserait plutôt l'irritation. L'air détruit la moelle nerveuse, il la raccourcit & la 
déssèche. La matiere électrique suit d'autres lois : elle ne pourrait pas être retenue par des 
ligatures, elle ne resterait pas dans le nerf, elle se répandrait dans les espaces voisins 
destitués d'une matière pareille, & se remettrait en équilibre. La division d'un nerf, dont les 
moitiés ne seraient pas éloignées l'une de l'autre, n'interromprait point le courant électrique. 
Peut-on exiger de nous, que nous désignions la nature de ce fluide ? ne pourrait-elle pas 
être isolée, différente des autres matieres connues, uniquement destinée à servir d'organe à 
la sensation & à la volonté, & à irriter efficacement la fibre musculaire. Tout ce que nous en 
savons, c'est que la matière de ce fluide doit se trouver dans les aliments, puisque dans 
la plus grande lassitude, lorsqu'on a lieu de croire ce fluide épuisé, une nourriture 
proportionnée aux besoins répare en peu de temps l'esprit animal, & rend les forces à l'animal 
épuisé. Le vin agit sur l'abeille, sur le cheval, sur le singe comme sur l'homme : on enivre les 
abeilles. 
On a disputé si le fluide nerveux coulait dans des canaux, comme le font les autres 
humeurs du corps animal, ou s'il se mouvait par une substance cellulaire. Je ne crois pas que la 
lumière des tuyaux des faisceaux nerveux puisse être distinguée à l'aide d'un microscope : mais 
la vitesse, avec laquelle s'exécutent les fonctions du fluide nerveux, ne paraît pas 
compatible avec la route embarrassée d'un tissu, dont les petites cloisons interrompraient à tout 
moment le mouvement de ce fluide.  
L'origine du fluide nerveux ne pouvant être que dans la masse de nos humeurs, & cette 
masse ne se communiquant aux diverses parties du corps animal que par les artères, ces tuyaux 
médullaires paraissent devoir naître de ces artères. Le fluide lui-même en recevra un 
mouvement lent, à la vérité, à proportion de la distance du coeur, & des obstacles que les 
humeurs éprouvent en parcourant cette distance. Un autre mouvement beaucoup plus rapide est l'effet 
de la sensation, de la volonté, ou de l'irritation. 
Y a-t-il une différence entre les esprits animaux ou entre les nerfs subordonnés au sentiment ou 
au mouvement ? Tout est conjecture là-dessus ; mais presque tous les nerfs donnent d'un côté aux 
muscles des branches destinées à y produire le mouvement, & de l'autre reçoivent les impressions 
des sens. Le nerf optique, qui dans les animaux plus composés se rend tout entier à la rétine, 
donne dans la chenille des branches musculaires ; on en peut croire M. Lyonnet, dont l'ouvrage est 
le chef-d'oeuvre de l'anatomie. 
Y aurait-il dans un faisceau nerveux des tuyaux
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