par un élément de courant est une force centrale, agissant à distance, et perpendiculaire à
l'élément de courant. De là il était facile de déduire que l'action mutuelle entre deux fils
parcourus par un courant est proportionnelle à leur longueur et à l'intensité des courants.
Ampère est alors prêt à donner une forme mathématique précise à cette action. Dès 1820, il
avait exprimé mathématiquement la force s'exerçant entre deux éléments de courant, i.ds et
i'.ds' par la formule :
les deux éléments de courant, formant les angles θ et θ' avec la droite qui les joint.
L'angle ω est l'angle entre les deux plans qui contiennent cette droite et chacun des deux
éléments. A cette époque, il ne détermine pas la constante k. En 1827 [1822] il montre que k =
1/2. La formule ci-dessus peut alors s'écrire :
Lorsqu'on intègre cette formule le long d'un circuit fermé (comme cela se fait en pratique), on
retrouve la loi de Biot et Savart.
Il était alors possible pour Ampère de s'attaquer quantitativement à la théorie du magnétisme.
Il montre que sa loi d'interaction entre éléments de courant conduit à conclure que les forces
magnétiques créées par un aimant constitué de molécules électrodynamiques se dirigent vers les
pôles. A partir de sa formule, il déduit également la loi de Coulomb sur l'action entre deux
pôles magnétiques. En bref, il parvient à unifier les domaines de l'électricité et du
magnétisme au niveau nouménal. La théorie était complète.
Cette théorie d'Ampère ne fut pas acceptée par tous. Son principal contradicteur, Michael
Faraday, qui ne pouvait suivre ces développements mathématiques, considère que l'ensemble de la
théorie est fondé sur des suppositions ad hoc pour lesquelles il n'existe aucune preuve.
La partie expérimentale est reconnue acceptée mais, même en France, la molécule
électrodynamique fut considérée avec suspicion. L'idée, cependant, ne meurt pas avec Ampère.
Plus tard dans le siècle, elle est reprise par Wilhelm Weber qui la met à la base de sa propre
théorie sur l'électromagnétisme.
Après 1827, l'activité scientifique d'Ampère se réduit nettement. Ce sont des années de soucis
et d'anxiété pour le bien-être de sa fille, alors que sa santé décline. Il produit
occasionnellement quelques mémoires, mais dans l'ensemble, le grand mémoire de 1827 marque la fin
de sa période de créativité scientifique. Il se consacre ensuite à l'achèvement de son Essai
sur la philosophie des sciences et à sa classification des sciences. Il dut retirer une certaine
satisfaction du fait qu'il avait, presque à lui tout seul, créé une nouvelle science qui trouvait
sa place dans son schéma taxonomique.
BIBLIOGRAPHIE
Sources primaires.
La source la plus importante sur la vie et l'œuvre d'Ampère est l'ensemble de quarante cartons de
documents conservés aux Archives de l'Académie des Sciences à Paris. Ce matériau a été
catalogué mais jamais utilisé. Pour la correspondance d'Ampère, voir Louis de Launay éd.,
Correspondance du Grand Ampère, 3 vol. (Paris, 1936-1943). Il faut utiliser cette édition
avec précaution car elle contient de nombreuses erreurs de transcription et elle n'est pas
complète. Elle propose cependant une bibliographie des œuvres d'Ampère à la fin du second
volume. On doit aussi consulter André-Marie Ampère et Jean-Jacques Ampère : Correspondance et
souvenirs (de 1805 à 1864) recueillis par Madame H. C. [heuvreux], 2 vol. (Paris, 1875), et,
toujours de Mme Cheuvreux, Journal et correspondance d'André-Marie Ampère (Paris, 1872).
Ces volumes doivent être utilisés avec une grande circonspection, car Mme Cheuvreux n'a pas
travaillé de manière scientifique et a changé l'ordre de passages entiers, insérant parfois un
morceau d'une lettre dans une autre pour des raisons artistiques. Les mémoires d'Ampère sur
l'électrodynamique ont été réimprimés par la Société Française de Physique sous le titre
Mémoires sur l'électrodynamique, 2 vol. (Paris, 1885-1887). Le Mémoire sur la
théorie mathématique des phénomènes électrodynamiques, uniquement déduite de
l'expérience (Paris, 1827), a été republié avec une préface d’Edmond Bauer (Paris,
1958). Des extraits de ce mémoire ainsi que d'autres mémoires d'Ampère ont été publiés en
anglais dans R. A. R. Tricker éd., Early Electrodynamics : The First Law of Circulation
(Oxford, 1965). Dans ce volume, l'éditeur développe un long commentaire d'une grande valeur pour
expliquer la théorie d'Ampère.
Sur les évolutions philosophiques d'Ampère, voyez Philosophie des deux Ampère publiée par
J. Barthélemy Saint-Hilaire (Paris, 1866), qui contient un long texte de Jean-Jacques Ampère
sur la philosophie de son père.
Sources secondaires.
Il n'existe pas de biographie de référence d'Ampère. C. A. Valson, André-Marie Ampère
(Lyon, 1885), et Louis de Launay, Le Grand Ampère (Paris, 1925), sont les biographies
standards, mais aucune ne traite de l'œuvre d'Ampère dans le détail. L'éloge funèbre rédigé
par François Arago fournit une étude de la réussite scientifique d'Ampère dans la perspective
d'il y a un siècle. Voyez ses Œuvres, 17 vol. (Paris, 1854-1862), II, 1 ff. Pour quelques
évaluations modernes du travail d'Ampère, voir la Revue générale de l'électricité, 12
(1922), supplément. Le numéro entier est consacré à l'œuvre d'Ampère. On trouve une
intéressante relation du début de la carrière d'Ampère dans Louis Mallez, A.-M. Ampère,
professeur à Bourg, membre de la Société d'Emulation de l'Ain, d'après des documents
inédits (Lyon, 1936).
Sur divers aspects de la carrière d'Ampère, voir Borislav Lorenz, Die Philosophie
André-Marie Ampères (Berlin, 1908) ; et Maurice Lewandowski, André-Marie Ampère. La
science et la foi (Paris, 1936). Dans le Bulletin de la Société des Amis d'Ampère,
qui paraît irrégulièrement, on trouve également des informations biographiques. Henry James,
"Les deux Ampères", dans French Poets and Novelists (Londres, 1878), et C. A.
Sainte-Beuve, "M. Ampère", dans Portraits littéraires, 3 vol. (Paris, 1862), I, sont deux
esquisses intéressantes.
On trouvera une explication de la molécule électrodynamique d'Ampère dans L. Pearce Williams,
"Ampère's Electrodynamic Molecular Model", Contemporary Physics, 4 (1962), 113 ff. Sur les
relations entre Ampère et l'Angleterre, voir K. R. et D. L. Gardiner, "André-Marie Ampère and His
English Acquaintances", The British Journal for the History of Science, 2 (1965), 235 ff.
L. Pearce Williams
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