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Sources primaires > LE MONNIER, Feu électrique, [octobre] 1756.
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étaient agités d'un mouvement quelconque. Lorsque les deux corps sont en repos, la lumière 
s'éteint par degrés ; mais si on touche le corps frotté avant qu'il ait entièrement perdu son 
électricité, la lumière se ranime aussitôt dans celui qui est vide d'air. 
C'est sans doute à cette facilité qu'a le feu électrique de se manifester dans un espace vide 
d'air qu'on doit rapporter la lumière qu'on aperçoit au haut du baromètre, en électrisant cette 
partie du tuyau par le balancement du mercure ; celle d'une bouteille mince & bien purgée d'air, 
qui contient quelques onces de mercure bien sec, & que l'on secoue dans l'obscurité ; enfin celle 
d'une semblable bouteille bien sèche & purgée d'air, que l'on frappe simplement à l'extérieur 
avec le plat de la main. 
Mais de toutes ces expériences faites dans le vide, il n'y en a pas de plus curieuse que celle que 
fit M. Hauksbee, avec un globe de verre de 6 pouces de diamètre, enduit intérieurement vers son 
équateur d'une large bande de cire à cacheter fondue : ce globe ayant été bien exactement vidé 
d'air, & appliqué à la machine de rotation, fit voir le fantôme lumineux de la main avec laquelle 
on le frottait, peint très distinctement dans la partie concave du globe, malgré le défaut de 
transparence de la bande de cire d'Espagne. Ce phénomène fut vu par les endroits des pôles que 
l'on avait conservés transparents. 
Le feu qui sort des animaux, des métaux, & autres corps électrisés par communication, est 
beaucoup plus vif, plus impétueux, & mieux rassemblé que celui qui sort immédiatement d'un vase 
de verre, d'un morceau d'ambre, ou d'un canon de soufre. Par exemple, on tirera d'une barre de fer 
posée sur des cordons de soie, & électrisée par le moyen d'un tube, une étincelle plus brillante 
& qui éclatera avec beaucoup plus de bruit que celle que l'on tirerait immédiatement de ce tube ; 
& plus on augmentera le volume & l'étendue de ces corps électrisés par communication, en joignant 
à cette barre de larges surfaces métalliques isolées comme elle, plus l'étincelle que l'on en 
tirera en approchant le tube électrisé au même degré sera vive & pétillera avec force. 
En général ce feu est d'autant plus brillant que l'explosion se fait avec plus d'impétuosité ; 
& l'explosion est d'autant plus grande qu'il s'échappe une plus grande quantité de matière 
électrique, accumulée précédemment sur un corps : c'est pourquoi si à des tuyaux de fer-blanc, 
d'une très grande longueur & d'un très grand diamètre, on applique l'électricité d'un ou de 
plusieurs globes de verre bien frottés, on aura les étincelles les plus vives, qui semblables à 
de véritables éclairs, s'élanceront d'une très grande distance avec bruit vers le doigt, & qui 
occasionneront une vive douleur. 
Lorsqu'un corps métallique, ou autre de même nature, a acquis par communication une atmosphère 
d'une certaine densité, la matière électrique que l'on continue de lui appliquer, s'en échappe 
à la fin & répand de la lumière ; quelquefois elle sort en forme d'étincelles, semblables à 
celles que l'on excite avec le doigt ; surtout si le conducteur n'a que des angles obtus, & qu'il ne 
soit pas fort éloigné de quelque corps non électrique : mais plus communément le feu s'échappe 
par les angles & par les pointes du conducteur, sous la forme d'une aigrette ou pinceau lumineux 
dont la pointe est un corps électrisé, & les rayons vont en divergeant à mesure qu'ils 
s'éloignent. Ces rayons sont d'autant plus divergents, que la vertu électrique est plus forte dans 
le conducteur : leur sortie est accompagnée d'un souffle & d'un murmure qui expriment l'effet avec 
lequel ils écartent les parties de l'air. Les matières qu'on plonge dans ces rayons, retiennent 
une odeur sulfureuse, & les roses rouges qu'on y expose pendant quelque temps y pâlissent. 
En présentant le doigt, ou tout autre corps non électrique un peu pointu, à l'aigrette qui sort 
d'un conducteur électrisé, on en voit paraître une autre, mais dans un sens opposé, à 
l'extrémité de ces corps qui regarde le conducteur. La distance à laquelle cette nouvelle 
aigrette paraît, varie non seulement suivant la densité de l'atmosphère du conducteur, mais 
encore suivant sa forme & celle du corps que l'on présente ; plus le conducteur est vaste & moins 
il a d'angles, plus cette distance est considérable ; plus le corps que l'on approche est mince, 
tranchant, ou pointu, plus cette distance est encore grande. A mesure que l'on approche le doigt du 
conducteur, ou quelque métal terminé en pointe, les aigrettes deviennent de part & d'autre plus 
fortes & plus brillantes ; elles se condensent bientôt quand la distance est peu considérable, & 
elles forment enfin ce trait de feu si vif, si subit, & si impétueux, qui caractérise si bien les 
éclairs : la personne qui présente son doigt ressent à chaque étincelle une vive douleur, & 
l'endroit où se fait l'explosion est marqué par une piqûre, accompagnée d'une ecchymose, comme 
serait l'effet d'une légère brûlure. 
C'est avec un pareil trait de lumière que l'on enflamme de l'esprit-de-vin un peu tiède, en le 
présentant, dans une cuillère de métal, à quelque angle émoussé du conducteur électrisé : on 
a allumé par le même moyen de la poudre à canon, & d'autres matières combustibles. 
Mais le feu électrique dont nous avons parlé jusqu'à présent, n'est qu'une bluette en 
comparaison de celui qu'on peut exciter en faisant l'expérience de Leyde : on a substitué à la 
bouteille dont on se servait pour cette expérience un large carreau de verre étamé des deux 
côtés, à la réserve d'une bande large d'environ deux pouces, qu'on a conservé tout autour sans 
étain. On place ce carreau sur un guéridon de métal, en sorte que la lame d'étain inférieur ait 
une communication libre avec la terre ; on fait communiquer par le moyen d'une chaîne la lame 
supérieure avec le conducteur qui reçoit l'électricité du globe : tout étant dans cet état, & 
le globe vigoureusement frotté, le carreau s'électrise, comme la bouteille dans l'expérience de 
Leyde ; & si avec un gros fil de fer courbé, émoussé par les bouts, & emmanché à l'extrémité 
d'une canne de verre, on ouvre une communication entre les deux surfaces étamées, il en sort un 
éclair terrible dont les yeux ne sauraient soutenir l'éclat, & dont le bruit se fait entendre de 
fort loin. Cette étincelle perce une main entière de papier que l'on pose sur la lame d'étain 
supérieure, & dont on approche le fil de fer courbé ; elle fond une feuille d'or serrée entre 
deux plaques de verre, & arrangée de manière que l'étincelle de l'explosion passe au travers, en 
faisant le circuit qui communique d'une lame à l'autre : la fusion est si complète, que le métal 
se trouve incorporé au verre à tel point, qu'il élude l'action des plus puissants menstrues. 
Cette étincelle ressemble si fort par ses effets aux éclairs & aux tonnerres que plusieurs 
physiciens n'ont pas fait difficulté d'assurer qu'un éclat de tonnerre n'était autre chose qu'une 
très violente étincelle électrique. Nous examinerons plus particulièrement cette analogie aux 
articles METEORES & TONNERRE. Nous ne pouvons cependant pas nous dispenser d'avancer ici que les 
nuages orageux qui passent assez près de la terre électrisent si fort nos barres de fer isolées 
sur des gâteaux de cire qu'elles rendent des étincelles beaucoup plus fortes que celles que nous 
pouvons produire par nos machines : que c'est cette matière électrique des nuages qui occasionne 
le feu S. Elme, les trombes de mer, & quantité 
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