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Plus peut-il attirer plus ?

Par Christine Blondel et Bertrand Wolff

Pour Dufay et plus tard pour Franklin et Aepinus, il existe deux espèces d'électricité : vitreuse et résineuse pour Dufay, positive et négative pour Franklin et Aepinus. Pour Franklin comme pour Dufay, deux charges d'espèces contraires s'attirent, deux charges de même espèce se repoussent. Mais cette loi fondamentale de l'électrostatique n'est absolue que dans le cas idéal de charges ponctuelles.

Les calculs d'Aepinus sur les interactions entre corps chargés l'amènent à mettre en question, pour des corps réels donc de dimension finie, la validité de la règle concernant la répulsion entre électricités de même signe. Lorsque deux corps se repoussent, ils portent nécessairement des charges de même signe. Mais la réciproque n'est pas vraie, souligne Aepinus. Deux corps portant des charges de même signe peuvent, dans des conditions particulières, s'attirer. En effet, si l'on rapproche suffisamment ces deux corps, la charge de l'un étant très supérieure à celle de l'autre, il arrive un moment où l'effet d'influence devient suffisant pour changer la force répulsive en une force attractive. Aepinus vérifie cette hypothèse par une série d'expériences. Auparavant il avait justifié par le calcul l'attraction exercée par un corps chargé sur un corps neutre, et montré qu'il suffisait pour cela que que les deux espèces d'électricité puissent se déplacer dans ce corps.

Rappelons l'explication qualitative de cette attraction dans le cas de l'expérience classique où le corps neutre est un petite sphère métallisée attirée par une baguette de verre électrisée positivement.

La sphère S reste électriquement neutre tant qu'elle n'est pas en contact avec la baguette B. Mais la distribution des charges électriques à la surface de S est influencée par B : les électrons libres du métal sont attirés vers B et une charge négative apparaît du côté gauche de S tandis que du côté droit, le déficit d'électrons se traduit par une charge positive de même grandeur. La force attractive entre B et la région négative de S, qui en est proche, l'emporte sur la force répulsive subie par la région positive, plus éloignée.

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Pour comprendre qualitativement la possibilité d'une attraction entre deux corps porteurs de charges de même signe, nous pouvons étendre ce raisonnement au cas où S est porteur d'une charge globale positive. Supposons cette charge suffisamment petite et l'influence exercée par B suffisamment forte pour que S ait encore une région négative et une région positive. Bien que la charge de la région positive soit plus élevée que celle de la région négative, il reste possible que la force attractive l'emporte sur la force répulsive, du fait de la décroissance des forces électriques avec la distance.

Quelles conditions doivent vérifier le rapport entre les charges de B et S, ainsi que la distance entre B et S, pour que la force attractive prenne le pas sur la force répulsive ? Aepinus ne pouvait préciser ces conditions. Ce calcul ferait intervenir la distribution des charges sur la sphère influencée... et serait d'une grande complexité.



Mise en ligne : juin 2008