Abria, Jérémie à Ampère, André-Marie
Limoges,
5 8bre 1835
Monsieur,
A votre passage à Limoges, au mois d'août dernier, vous eûtes la
bonté de me communiquer vos recherches sur la division du cercle en 17 parties
égales, et vous m'engageâtes à vérifier sur quelques exemples ce
théorême auquel le calcul vous conduisait. Tout nombre de la forme 2n+1 ne peut
être premier que lorsque n est une puissance de 2.
En effectuant cette vérification, je fus conduit à cette proposition : tout
nombre de la forme 2exp[2q(1+2k)] + 1 est divisible par sa valeur pour k=0,
c'est-à-dire par 2exp(2q) + 1. Ce théorême renferme le premier car,
tout nombre entier n pouvant être représenté par une expression de la forme
2q(1+2k), q, k étant des nombres entiers convenablement choisis, il
s'ensuit que tout nombre de la forme 2n+1 aura au moins un facteur, à
moins que n ne soit de la forme 2q , auquel cas 2n +1 pourra être
premier.
La démonstration de ce théorême est extrêmement simple, et si
j'avais eu quelques moments de loisir lors de votre séjour ici, je crois pouvoir
affirmer que je vous l'aurais communiqué avant votre départ. La voici
:
qui est la suite des puissances successives et décroissantes de P, depuis 2k
jusqu'à zéro, les puissances paires étant affectées du signe +,
et les puissances impaires du signe – .
Or q, k étant entiers, chacun des termes du quotient est entier : le quotient
lui-même est donc aussi un nombre entier.
S'il existait dans ce raisonnement quelque défaut, je vous serais infiniment
obligé, si vous daigniez me le faire connaître. Ce me serait pas seulement un
honneur pour moi de recevoir vos conseils, Monsieur, mais vous me rendriez encore un
véritable service.
Vous m'aviez engagé aussi à chercher la valeur de q pour laquelle
les nombres que l'on obtient en substituant dans l'expression 2exp(2q) + 1,
à q les valeurs successives 0, 1, 2, 3,... cessent d'être premiers. J'ai
commencé le calcul depuis quelques jours seulement, et dès que je serai parvenu
à quelque résultat, je m'empresserai de vous le faire connaître. Si je
puis encore faire quelque travail qui vous soit agréable, je m'y livrerai avec grand
plaisir.
On a demandé à M. le Ministre de l'Instruction publique les mémoires
de l'Institut et le Journal de l'école polytechnique pour la Bibliothèque
de la ville. Si l'occasion s'en présente, je vous prierais de vouloir bien lui
rappeler combien de pareils ouvrages peuvent être utiles aux jeunes professeurs de
province.
J'ai l'honneur d'être avec respect,
Monsieur,
Votre très humble et obéissant serviteur,
Abria
ancien élève de l'Ecole normale, Dt de
physique.
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Source de l'édition électronique de la lettre : original manuscrit Archives de l'Académie des sciences, carton 1, chemise 10
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Lien de référence : http://www.ampere.cnrs.fr/amp-corr1154.html
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