Proviseur du lycée d'Avignon (nom illisible) à Ampère, André-Marie
A Monsieur Ampère, Inspecteur général des études
Avignon,
le 11 juillet 1834 Monsieur l'Inspecteur, Avant que vous quittiez notre académie, je tiens
à vous convaincre de plus en plus que l'ancienne distribution des classes faite au
Collège d'Avignon depuis 1830 était très favorable aux études et
que je ne l'avais point faite de mon chef ni sans m'environner des lumières et de
l'approbation de tous les intéressés. D'abord il y avait à cette
époque (et encore aujourd'hui l'on n'est pas d'accord sur bien des points), il y avait,
dis-je, tant d'incertitude sur la division des classes, que les proviseurs et les recteurs
étaient forcés d'émettre une opinion personnelle. Il venait de
paraître un nouveau règlement pour les classes que l'on trouve
inséré dans le Journal de l'Instruction publique, sous la date du 21 octobre
1830, qui mettait de la chimie en seconde, de la physique en rhétorique, etc., en un mot
qui convenait à nos besoins. Ce règlement n'a pas été mis dans le
bulletin universitaire, comme nous nous attendions à l'y voir ; mais nous n'avons vu que
plus tard que les collèges de province ne recevraient pas l'injonction de
l’exécuter. Nous devions donc nous considérer à peu près
comme libres dans le règlement de nos classes selon un système ou l'autre. Nous
crûmes prendre le plus récent. Une raison des plus importantes pour employer
à des classes inférieures nos professeurs de physique et de mathématiques
spéciales, c'est qu'il n'y avait pas d'élèves pour ces classes
élevées et nos études étaient si faibles que nous ne pouvions en
espérer. Ai-je donc pris sur moi, comme le dit perfidement une note
à ce sujet, ai-je pris sur moi de tout changer selon mon caprice ? J'en ai
conféré avec les professeurs de sciences qui tous ont trouvé à
propos et très convenable l'ordre des choses qui leur était proposé.
L’un d’eux a même tracé les matières qui devaient être
enseignées dans chaque classe. Je vous adresse en communication ce programme. S’il
n’a pas été suivi, c’est qu’on a déclaré que la
faiblesse des élèves en arrêtait l’exécution pour le moment.
Vous verrez clairement et en toutes lettres que deux leçons en seconde sont
consacrées à l’enseignement de la géométrie. Vous
verrez même quelle espèce de géométrie, ou partie de
géométrie, on devait enseigner dans cette classe. Non seulement j’avais
pris l’avis des professeurs, mais le tout avait été soumis aux
autorités académiques. J’ai sous les yeux trois lettres de M. le Recteur,
qui approuve très explicitement cet ordre de choses ; l’une du 16 novembre 1830,
l’autre du 10 Xbre même année, l’autre de juin 1833. Je ne
les produirai point, mais il me suffira de vous le dire pour asseoir votre conviction
personnelle à cet égard. Je me décide seulement à vous communiquer
le brouillon du plan qui me fut adressé par l’Académie et que j’ai
reproduit dans le tableau que j’affichai dans la cour des classes et que je prends la
liberté de vous communiquer avec sa crasse d’une année d’exposition.
Vous pourrez reconnaître l’écriture de l’auteur du plan, qui sera loin
de le désavouer. Je veux que vous soyez bien persuadé de deux choses :
1° que je n’ai point fait mon plan tout seul, 2° que deux séances en
secondes devaient être consacrées à la géométrie. Si
les élèves en 1833 ont été faibles en géométrie,
c’est un accident qui tient aux élèves ou au professeur. Mais le moyen de
rendre plus forts les élèves de seconde n’était pas de supprimer une
partie des leçons qu’ils devaient recevoir en troisième. Les parents
ont vivement regretté la destruction de l’ordre des choses établi et
plusieurs hauts fonctionnaires de l’université ont regardé comme un mal
cette suppression. Mais certes il y avait une grave injustice à me faire subir la peine
de la censure en présence de tous mes inférieurs, pour le bien que
j’avais voulu faire et que j’avais fait. Car si nos élèves ont
montré depuis quelque goût pour les sciences, je soutiens qu’on le doit
à la forte impulsion que j’avais donnée. Je désire qu’il
soit fait mention dans votre rapport au Ministre des plaintes amères que je fais de la
manière inconcevable dont ont agi à mon égard MM. [Maudet] et [Soulet de
l’Isle]. Au reste j’ai des plaintes à faire sur d’autres sujets
relatifs aussi à cette époque, je les ferai d’une manière
éclatante par la presse et par la Chambre des députés, puisque l’on
s’obstine à ne pas renier le passé. Vous pouvez communiquer à
Monsieur votre collègue les trois pièces que j’ai l’honneur de vous
expédier, et en conférer avec lui pour en faire l’objet d’une note
spéciale. Après tous ces détails fastidieux, je regrette de
n’avoir pas plus de place pour vous dire à tous les deux combien votre visite nous
a été agréable, et combien le souvenir nous en sera doux. Vous avez pu
voir que nous ne demandons point de faveur ni d’indulgence, nous nous contentons de votre
probité, de votre justice et de votre [véracité]. Veuillez
présenter mes hommages respectueux et affectueux à l’aimable M. Matter et
recevoir pour vous le tribut ordinaire de mon attachement et de ma vénération. Votre très humble et très obéissant serviteur, [signature
illisible] Après lecture, ayez la bonté de me renvoyer les trois
pièces ci-jointes. A un autre jour pour les discussions sur la
mathésiologie…
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Source de l'édition électronique de la lettre : original manuscrit Paris, Archives de l'Académie des sciences, fonds Ampère, carton XXVI, chemise 393ter.
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Voir le fac-similé : |
Lien de référence : http://www.ampere.cnrs.fr/amp-corr1060.html
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