@. Ampère et l'histoire de l'électricité 

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@.ampère

Correspondance d'Ampère, Lettre L738

Présentation de la Correspondance

Ampère, André-Marie      à      Ampère, Albine (fille d'Ampère, épouse Ride) (1)

A Madame Ride-Ampère, rue des Fossés-Saint-Victor, n° 19, à Paris.
Hyères, 18 janvier 1830

Mon Albine chérie. Voilà deux lettres de toi que j'ai reçues et je n'avais répondu à la première quand la seconde vient de m'arriver. Que cela ne t'empêche pas d'écrire à ton bon papa qui t'aime au delà de toute expression ! C'est mon plus grand bonheur ici que de recevoir des nouvelles de ma fille bien-aimée. Que mon silence ne t'empêche donc pas de m'écrire aussi souvent que tu le pourras ! Tu diras en prenant la plus plume (sic), « je vais faire bien plaisir à mon papa en lui donnant de mes nouvelles, de celles de toutes les personnes qui me sont le plus chères, de ceux qui l'intéressent, de la maison même et du jardin ». Tous les détails que tu m'as donnés dans la lettre que je n'ai reçue que ce matin quoique tu l'eusses écrite le 5 janvier, m'ont fait le plus grand plaisir. La raison qui m'empêche de t'écrire plus souvent est la fatigue que j'éprouve à faire une lettre ; elle m'engage à remettre toujours au lendemain celles que je veux écrire et le lendemain passe comme la veille. J'ai eu une espèce de rechute pour être sorti à cheval par un soleil ardent et un vent très fort la veille de Noël. La toux et les crachats étaient revenus, mais ils ont passé de nouveau. Seulement, je ne vais plus me promener qu'en voiture quand le temps le permet. Ces promenades me font un bien qui surpasse tout ce qu'on pourrait croire ; j'en ai fait 27 depuis que je suis à Hyères.
Le froid a été rigoureux ici relativement au climat ; on a perdu ici pour plus de cent mille francs d'oranges qui n'avaient pas encore été cueillies. Heureusement qu'on assure que les arbres n'ont pas souffert, mais on a en de grandes craintes pour eux. Le lendemain d'une gelée, il fait un temps chaud et beau comme les plus belles journées du mois de mars à Paris. Les environs d'Hyères, surtout les bords du Gapeau sont charmants. Le Gapeau se jette dans la mer tout près d'Hyères. Il y a, de l'autre côté d'Hyères, en retournant vers Paris, deux autres ruisseaux, le Roubeau et le Reganat, dont les bords sont aussi fort jolis. Les vues sont admirables. La plus belle que j'aie vue dans ce pays est sur une montagne près de la mer où un âne m'a porté, il y a déjà du temps. Le haut de cette montagne s'appelle la Bonne Mère parce qu'il y a une église à la Sainte Vierge.
J'ai fait ici connaissance avec plusieurs Messieurs qui me plaisent beaucoup ; presque tous jouent aux échecs ; avec eux et mon fils qui l'a appris, j'en ai autant que je veux. En (général) je suis ici aussi bien que possible, ce qui ne m'empêche pas de désirer toujours plus vivement de me revoir à Paris, d'embrasser mon Albine et de me trouver tous les jours près d'elle. Ce que tu dis à Ampère de la santé de Gabriel me fait une peine extrême. Dis-lui bien combien je fais de voeux ardents pour qu'elle s'améliore et qu'il n'ait que des sujets de satisfaction cette année. Quant à ceux que je forme pour toi, tu sais trop tout ce que je sens pour qu'il soit nécessaire de te le dire.
Il y a ici une espèce de rosier à feuilles toujours vertes, qui croît partout et qui, avec les smilax, les grandes bruyères, les cyprès, les pins d'Alep et les chênes verts, conservent à l'hiver une partie de l' (aspect) du printemps.
N'oublie pas d'offrir à ma soeur et à ma cousine les vœux les plus empressés pour que tout soit pour elles à souhait cette année et mille tendres témoignages d'amitié. La même chose pour Mme et Carron, son mari et Éliza et Pignot, si tu peux le leur dire.
M. de Tournon, pair et conseiller d'État que j'ai connu en 1822 à Lyon, où alors il était préfet, est venu loger avec sa femme et ses enfants au premier étage de la maison dont j'occupe ici une partie du second. C'est un joueur d'échecs et nous nous battons de temps en temps, soit chez moi, soit chez lui. Je t'embrasse mille fois de toute mon âme, ma bonne Albine. J'embrasse bien tendrement ton mari et cède la plume à ton frère qui veut aussi te répondre. Adieu la bien-aimée de ton père.

A. AMPÈRE

(P. S. de Jean-Jacques).

J'écrirai demain à ma tante, mais je ne veux pas que Papa ferme sa lettre sans que j'y mette un mot pour ma bonne soeur que j'aime tendrement, que je plains souvent de ses ennuis et qui n'aura jamais de meilleur ami que son frère. Je plains beaucoup aussi mon excellent frère, je suis charmé qu'il se soit réconcilié avec Alphonse. Car, dans votre querelle, je n'aurais pu me décider à en vouloir à personne. Si Alphonse est à Paris, ou si tu lui écris, dis-lui ce que je t'écris là. Tâchons de rester tous bons amis. Je t'embrasse.



(1) Coll. Bodin. Quatre pages 20,5 x 26, adresse sur la quatrième. Hyères, d'après le timbre
de la poste.

Correspondance du Grand Ampère, tome III, p. 954-955-956
  Source de l'édition électronique de la lettre :
DE LAUNAY (Louis). Correspondance du Grand Ampère. tome III. Paris : Gauthier-Villars, 1943. p. 954-955-956


  Autre source de la lettre : original manuscrit
Collection Noël Bodin [note de Louis DE LAUNAY]
(Quatre pages 20,5 x 26, adresse sur la quatrième. Hyères, d'après le timbre de la poste. [note de Louis DE LAUNAY])


Voir le fac-similé :   
Lien de référence : http://www.ampere.cnrs.fr/amp-corr738.html

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