@. Ampère et l'histoire de l'électricité 

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Correspondance d'Ampère, Lettre L1129

Présentation de la Correspondance

Geoffroy-Saint-Hilaire, Etienne      à      Ampère, André-Marie


[Paris] Au jardin du Roi, le jeudi 23 février 1832

Mon savant confrère
J'ai sous les yeux un extrait étendu de votre leçon de ce jour. Permettez-moi d'en discuter avec vous. Génie, savoir, droiture des sentiments et bonté du cœur, voilà ce que je reconnais en vous, et [c'est?], avec moi tous ceux qui vous connaissent.
Vous avez fini par m'attribuer une idée autre que celle que j'ai énoncée, et déjà je m'en suis expliqué dans la brochure ci-jointe, page 4. J'ai dit que les pleuronectes étaient déjà renversés par un tour de conversion ¼ et nageaient de côté, quand les insectes et les crustacés étaient renversés par un double tour de conversion et avaient le dos intérieurement et le ventre supérieurement. J'ai fait mieux que d'articuler ce fait, je l'ai représenté en plaçant dans la situation des vertébrés une coupe d'un crustacé. Je vous remets cette figure pl.19 fig. 2Selon toute vraisemblance, il s'agit de ce document conservé aujourd'hui dans la chemise 255 du fonds Ampère..
De mon premier [bond?] des vertébrés aux insectes, je ne suis pas de suite arrivé aux idées pleines de mérite que vous avez développées aujourd'hui. Mais de ce premier jet, je n'en n'ai pas moins brossé assez vigoureusement la matière. Ce qui m'a valu à Paris une improbation et en Allemagne (à Leipzig) de grands applaudissements. A Paris, onGeorges Cuvier. y a dit qu'il n'y avait de commun entre l'insecte et le vertébré que l'animalité et que chercher des rapports au-delà était absurde. A Leipzig, on a importé mon mémoire, repris du Journal complémentaire [du Dictionnaire des sciences médicales], dans l'Isis, en insérant ce mémoire dans sa langue primitive avec l'annotation suivante : nous ne traduirons pas cet écrit "si chaud, si hautement pensé, si élevé en combinaisons philosophiques, si profond pour ses rapports aperçus". Au même moment cet écrit était aussi imprimé à Bruxelles. Ainsi il a eu des retentissements sympathiques chez les penseurs.
Quand j'ai fait mes travaux de ce genre, M. Serres ne nous avait pas encore appris qu'il n'y avait ni cerveau ni moelle épinière : M. Cuvier m'avait fourni l'élément de cette erreur qu'il renouvela dans la discussion avec moi en 1830. J'avoue que je n'eus pas alors le courage de le relever publiquement, mais je l'ai fait dans la note écrite à ce sujet dans ma Philosophie zoologique. On [prit] alors pour ignorance ce qui avait été combat intérieur, une hésitation de bienveillance à l'égard de mon adversaire.
Qui avez-vous voulu relever et combattre quand, par deux fois, vous affirmez que le scarabée et l'homme ne se ressemblent pas ? Je ne sache personne qui ait fait cette méprise. C'est [?presque] de nouvellement ce mot qui me fut jeté à la tête, quelle ressemblance entre l'éléphant et un mollusque ? Alors on voulait exciter le rire moqueur des assistants, on leur insinuait que c'était là une de mes prétentions ; on avocattait [sic].
Le mot ressembler a une signification si précise qu'on l'emploie à dire que, dans toutes les foules d'un vaste pays, il n'y a pas deux familles qui se ressemblent.
Il y a bien longtemps que plus instruit des faits, j'ai abandonné l'idée de l'insecte renfermé dans son cycléal. Pauvres défricheurs, on vous reproche vos premiers coups de pioche à titre de mal assurés ; sans doute que, pour des successeurs, le [remaniement] du sol est un peu moins difficile : y songe-t-on ?
On a dit que l'inventeur de la théorie sur le chlore avait fait de la chimie sèche. Je l'aperçois faire maintenant avec le même bonheur de l'anatomie sèche. Honneur et gloire à d'aussi brillants succès.
Veuillez, mon cher confrère, [ne] vous point affecter de cette lettre, et me croire votre profond et dévoué admirateur.

Geoffroy-Saint-Hilaire



  Source de l'édition électronique de la lettre : original manuscrit
Paris, Archives de l'Académie des sciences, fonds Ampère, carton XXIV, chemise 351


Voir le fac-similé :
Lien de référence : http://www.ampere.cnrs.fr/amp-corr1129.html

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